Né le 6 octobre 1981 à Kara (Préfecture de la Kozah), commerçant, marié et père de 4 enfants en bas âge, TAGBA Djafarou a été arbitrairement arrêté dans l’Affaire « Tigre Révolution » le 23 novembre 2019, dans sa boutique à Attiegou, par des gendarmes qui recherchaient l’oncle de sa femme, impliqué dans une affaire qu’il jugeait quelconque car on n’a même pas daigné alors lui en expliquer les tenants et les aboutissants.
Dès qu’ils se sont saisis de lui, c’est sur champ que ces gendarmes ont commencé à lui infliger des coups, le passant sauvagement à tabac pour briser toute résistance de sa part. Suite à quoi il a été menotté et cagoulé puis enlevé, de fait comme otage à la place de l’oncle de sa femme recherché, pour être conduit dans un lieu de détention secret jusqu’aujourd’hui inconnu de lui et où il a été détenu pendant 46 jours.

Extrait chaque jour de la pièce où il est détenu, on lui fait subir des traitements inimaginables et atroces car cruels, inhumains et dégradants comme tous ceux qui ont été arrêtés dans cette affaire « Tigre révolution » que le journal Le Rendez-vous présente dans son N° 353 du 06 novembre 2020 comme une « affaire rocambolesque au centre de laquelle se trouve un individu trouble dit « Master Tiger », naviguant entre le Togo, le Ghana et plusieurs pays d’Europe dont la Hollande, l’Angleterre, et la Belgique, libre à ce jour de ses mouvements et soupçonné de liens controversés avec la Police. (…)
Détenus au Camp des gardiens de préfecture (Camp GP) à Agoè-Logopé, et dans les lieux de détention secrets de l’ancienne Agence nationale de renseignement (ANR), les mauvais traitements auraient conduit au décès de cinq d’entre eux. »
A propos de ces mauvais traitements, le journal Le Rendez-vous a donné, dans son même numéro précité, les détails suivants :
« Une victime encore détenu témoigne de ce qu’elle a vécu. De son témoignage, nous vous ferons économie de certains détails pour protéger sa vie : « quand ils m’ont pris, ils m’ont amené au camps GP comme beaucoup d’autres, ils nous prennent à différents endroits mais on connaît les mêmes traitements. Ils m’amènent dans la salle d’audition menotté et jeté par terre. Un commandant vient et me fait approcher de la table autour de laquelle il y avait 4 autres chaises et ils m’interrogent. Ils m’interrogent sur l’affaire Tiger. J’ai dit je n’en sais rien. Ils ont insisté. Actuellement mon portable …, ils ont tout fouillé sans rien voir…, je ne peux pas tout dire. Ils me demandent d’après un ami et je dis je le connais mais je ne sais où il habite. Il ne loge pas chez moi. Alors ils ont commencé à me rouer de coups toujours menotté. Je leur demande de fouiller mon téléphone, j’étais interrogé entre deux scènes de torture. Ils m’ont amené en cellule et de temps en temps ils me ramènent dans cette salle pour frapper et torturer afin que je dise quelque chose qui me culpabilise. Ils n’ont rien obtenu. Pour dormir, ils me gardent toujours avec les mains menottées par derrière jusqu’au petit matin. Ils faisaient tout pour que j’invente quelque chose qui me compromette avant qu’ils arrêtent de me torturer. A un moment donné, ils m’ont proposé un deal, je devrais dire que……. Avant moi, ils ont proposé ces deals à beaucoup d’autres amis d’infortune. Nous tous on est arrêtés dans différentes circonstances, à différentes dates, souvent on ne se connait pas. Mais on se rejoint sur une chose, tout le monde a refusé ce qu’on lui propose de dire pour soi-disant avoir sa liberté ou obtenir tel ou tel avantage. Ce refus unanime de ce qu’ils appellent eux-mêmes « collaboration », nous a coûté cher, certains en sont morts. Je résiste à leur proposition, pour me pousser à accepter dans les moments du deal, ils menottent ma main contre mon pieds avant que je dorme la nuit. Quand on est arrivé, des semaines durant, il ne suffit pas d’avoir les moyens pour manger comme on veut. Aucune famille ne sait qu’on est là-bas. Pour manger, on ne doit pas dépenser plus de 200 F CFA par jour malgré que ce soit notre propre argent que nous avons sur nous. Donc comme unique menu de toute la journée, on n’a pas droit à un repas de valeur supérieure à 200 FCFA. Si éventuellement ton argent finis sur toi, tes amis peuvent te dépanner. Donc notre organisme a droit à 1 400 F CFA pour 7 jours. On vous couche et on vous frappe dans les plantes des pieds, pour marcher de la cellule à la salle des interrogations, c’est une corvée. Deux semaines après, on nous a présentés à la presse. Devant le commandant, on dit à certains d’entre nous de dire qu’ils sont initiateurs du projet et que c’est tel ou tel qui sont les cerveaux. Ils nous informent qu’ils vont nous amener quelque part où nous allons nous approprier un projet de violence que nous ne connaissons pas afin d’être libres. On ne sait où. La voiture arrive. On se retrouve à la Sûreté. Pendant que nous y étions, on voit un autre camion décharger des armes blanches et tout ce que vous avez vu à la télévision. Nous avons alors compris qu’ils veulent nous passer à la place publique sur les médias. Certains parmi nous étaient choisis par eux pour tenir certains discours. Certains ont dit le contraire et le commandant n’était pas d’accord. On nous a ramené au camp. Certains d’entre nous qu’on a préparés pour dire des choses qu’ils n’ont pas accepté dire ont été sévèrement torturés pour avoir trahis la « collaboration ». Après, on nous a présenté au procureur. De là, on est jeté en prison et depuis lors, rien n’a bougé. On ne nous dit rien ».

Témoignage d’un malade : « Depuis que nous sommes là-bas, on nous frappe trois fois par jour : le matin à 6H 30, à 12H 30 et le soir à 17H 30 ; c’était un exercice où on te couche pour te frapper en désordre tantôt sur le ventre tantôt sur le dos. Depuis notre détention, il y a presqu’un an, on ne mange qu’un riz préparé sans sel ni piment, on a jamais vu la pâte ou autre repas. La nourriture est notre première source de maladie, nous tous on a les plaies dans le ventre. On est ensemble, mais on ne se parle jamais, l’échange est interdit». Nous vous faisons économie de certains témoignages.
Depuis quelques semaines, les détenus clandestins depuis des mois sont amenés et gardés en isolement dans la Prison de Lomé, certains d’entre eux au Cabanon. Parmi ces détenus ramenés des lieux de torture et gardés à la Prison civile de Lomé, se trouvent 4 de nationalité béninoise. Nous avions pu joindre leur famille au Bénin pour leur annoncer que leurs fils sont en détention à Lomé. Au téléphone, c’était des cris incontrôlés de joie, cette famille au Bénin comptait depuis ses enfants de l’autre côté de la rive. C’était comme une équipe venait de marquer un but dans une compétition serrée.
Ce qui est grave est qu’ils sont gardés au camp GP pour y être torturés alors qu’ils sont enregistrés pour être à la Prison civile de Lomé (PCL). En effet, ils sont enregistrés à la PCL alors que c’est le Camp GP, qui n’a pas de gardes pénitenciers, qui les garde en clandestinité. Oui, évidement, le Camp GP est sur le registre de la Prison civile or ce camp n’a pas de gardes pénitentiaires. En lieu et place des gardes pénitentiaires à qui on a appris l’art de s’occuper d’un détenu, au camp GP, le détenu est à la merci des tortionnaires qui se défoulent sur lui tous les jours. Comme menu, il leur est servi une fois par jour un riz venant du Camp FIR. Ce riz, les détenus l’appellent béribéri. Les juges instruisent des dossiers et les présumés coupables sont détenus dans les couloirs de la mort sans que cela ne fasse sourciller personne. C’est aussi ça la justice au Togo. Le doyen des Juges Yacenth Adjolé en sait beaucoup dans cette affaire de détentions clandestines sur fond de tortures et morts d’hommes. (…) »

C’est le cas pour TAGBA DJAFAROU qui, le 8 janvier 2020, a d’abord été transféré du lieu de détention secret où il était gardé depuis son arrestation le 23 novembre 2019 au camp GIPN d’Agoè-Logopé avant d’être présenté, deux jours plus tard et au bout de ce calvaire, à la Justice togolaise qui, totalement inféodée au pouvoir politique togolais, le défère à la Prison civile de Lomé, le 10 janvier 2020.
Alors que, lors de son audition par le juge d’instruction, celui-ci l’a rassuré qu’une fois retrouvé l’oncle de sa femme qu’on recherchait comme présumé coupable dans l’Affaire « Tigre révolution », il recouvrirait sa liberté, il n’en a rien été. Car, malgré que celui-ci ait été retrouvé au début du mois de février 2020 et inculpé pour cette affaire « Tigre révolution », il n’a toujours pas encore recouvré sa liberté.
Transféré le 14 juin 2020 à l’ancienne direction générale de la Gendarmerie nationale togolaise, en face de la BIDC et de la BOAD, TAGBA Djafarou y est détenu avec 72 autres prisonniers politiques ou non, dans une mini villa où ils vivent continuellement dans le noir, sans voir le soleil au quotidien et sans être autorisés à sortir dans la cour de la maison sauf en cas de maladie où ils sont conduits à l’infirmerie ou à l’Hôpital. C’est sous ce régime, qui est une autre forme de torture, qu’ils vivent depuis lors.

Parce que TAGBA Djafarou souffre actuellement de différentes pathologies dues aux maltraitances et autres traitements cruels, inhumains et dégradants qu’il a subis tout au long de son arrestation et de sa détention comme les 76 autres prisonniers politiques de l’Affaire « Tigre Révolution », il doit être libéré immédiatement et sans condition comme le prescrivent le Code pénal togolais et les instruments internationaux ratifiés par l’Etat togolais.